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Le mélange entre tangible et numérique est au cœur des révolutions à venir. 

par mktg_exap
8 minutes de lecture

Antony Legrand est un touche-à-tout, à la fois directeur artistique, UX et UI designer, concepteur rédacteur, community manager et formateur. Cet homme-orchestre a vu les métiers de la création graphique migrer du print vers le web. Si la donne a clairement changé aujourd’hui, cet insatiable curieux estime que les nouvelles technologies vont redonner vie… au print !

Que fait un directeur artistique qui n’est pas rattaché à une entreprise particulière ?
Il s’éclate 😉 ce qui est quand même l’objectif principal ! Je n’aime pas être cantonné à une seule spécialité. J’ai toujours été touche-à-tout. J’aime dire que je suis « Designer d’Expérience » car mon métier mélange quasiment à chaque fois de la direction artistique print & web, de l’UX (User Expérience), de l’UI (User Interface), du story telling (conception rédaction), du community management (déploiement print & web). Je suis même formateur et conférencier par moments… Je suis quelqu’un qui s’ennuie très vite, donc le fait de jongler avec tout ça me permet de lutter face à cette crainte.

L’énorme avantage de cette indépendance est aussi de pouvoir choisir mes projets. Je suis également totalement libre dans les choix de l’équipe avec laquelle je travaille, ça me permet de fédérer des compétences pour des projets temporaires, en créant et en gérant des structures éphémères et rapidement opérationnelles sur des missions spécifiques.

Parfois, certains clients imposent une partie de leur Team mais j’essaie de plus en plus de gérer chaque poste d’un projet. Ceci me permet d’assurer une qualité et une cohérence globale au client.

Je vends de plus en plus de « concepts » dans lesquels je propose du Cross média global… Je crée un concept, j’écris pour le raconter, je crée une direction artistique globale et j’imagine chaque média potentiellement intéressant pour raconter cette histoire… Ça va de la photo à l’illustration en y apportant de la vidéo et du motion, le tout diffusé à travers une expérience digitale.

Comment êtes-vous devenu directeur artistique ?
Mon parcours est assez atypique, car je ne me dirigeais pas du tout vers ça à la base… J’ai fait un Bac L, pensant devenir journaliste, pour poursuivre ensuite en LEA, puis j’ai fini par faire un BTS Action commerciale. Pendant ce temps, pour éviter des Jobs d’été bien chiants, je suis devenu animateur en colonies de vacances.

Mais pendant mon temps libre, je passais mon temps à dessiner, à bidouiller sur Photoshop, à regarder plein de tutos en anglais et à faire des flyers pour des amis DJ et rappeurs. Au fur et à mesure, ce hobby est devenu mon activité principale et à force de créer des projets je suis devenu directeur artistique indépendant. Le seul truc que je savais depuis tout jeune, c’est qu’il fallait que j’essaie de gagner ma vie en m’amusant. C’est ce qui me guide encore aujourd’hui dans ce que je fais.

Cela fait 15 ans que vous travaillez dans ce secteur. Comment les choses ont-elles évolué ?
Au début, je ne faisais quasiment que de la retouche photo, du photo montage et du print (DA, mise en page…). Mais, à l’époque je sentais bien la puissance du web arriver… Les expériences Flash étaient de plus en plus hallucinantes, la diffusion de vidéos web se facilitait avec des outils comme Youtube, Dailymotion et le déploiement de l’HTML et du CSS qui évoluaient à une vitesse folle. C’est d’ailleurs tout ça qui nous a poussés à lancer le site Wisibility car on avait enfin la possibilité de proposer facilement des vidéos de formation rapidement lisibles depuis la maison. L’arrivée de la puissance des réseaux sociaux a décuplé ces possibilités !

Ensuite, quand Steve a annoncé le premier iPhone, là j’ai compris qu’on était devant une révolution : le mobile. Je me suis engouffré directement là-dedans, ça m’a passionné et je crois que j’ai eu raison ;).

Vous n’avez pas fait de formation spécifique/dédiée. Un parcours « sur le tas » est-il encore envisageable pour un jeune aujourd’hui ou l’école/la formation pro est-elle mieux adaptée ?
Bien sûr que c’est possible, c’est même beaucoup plus facile qu’avant ! Le Web permet ça, on peut se former sur n’importe quel sujet, avoir accès à toutes sortes d’entraides avec les forums, les tutoriels, les MOOC… On peut rentrer en contact rapidement avec n’importe quel professionnel (même les plus haut placés), via Twitter ou Facebook. Le nombre de communautés spécialisées est juste incroyable. Pour faire un parallèle, c’est un peu comme si vous me demandiez si on peut devenir acteur sans faire d’école de théâtre… Regardez le succès hallucinant des Youtubeurs qui aujourd’hui dépassent clairement la télévision en terme d’audience !

Alors bien sûr, faire une école est quand même le meilleur parcours possible car on apprend des bases tellement importantes pour la suite que je le conseille évidemment ! Je n’ai pas eu cette chance et je vois bien que ça m’aurait vraiment aidé sur pas mal de points !

Quelle est la place du print dans votre travail ?
Aujourd’hui, les demandes en terme de business se sont clairement inversées. Il y a 10 ans, je faisais 80 % de print et 20 % de web, aujourd’hui c’est 80 % de Web et 20 % de print.

Vous avez rapidement mis de côté la retouche photo pour aller vers le web : le print est-il mort ?
Aha, je déteste ce genre de phrase 😉 ! Comment peut-on dire que le « print est mort »… Je ne comprendrai jamais ceux qui essayent d’opposer des médias entre eux. En tant que « Designer d’Expérience », j’adore autant le tangible que le digital ! Mon kif ultime étant de mélanger les deux pour créer une expérience unique. Le but d’un designer est de raconter une histoire pour créer de l’émotion, de l’empathie afin de livrer un message quel qu’il soit. Pour ça, on doit utiliser tous les moyens possibles et imaginables ! Comment pourrait-on par exemple se priver de la sensation du toucher ou même de l’odorat ! Sentir l’odeur du papier, caresser un vernis Soft touch, une texture de papier… C’est magnifique et tellement inspirant !

Les gens qui disent que le print est mort sont ceux qui ne voient le papier que dans son business « primaire »… Si on parle de « marketing » à l’ancienne consistant à inonder les boîtes aux lettres d’imprimés, de Flyers de boîte de nuit ou même de « journaux traditionnels »… là oui, le print est mort !

Aujourd’hui c’est évident que tout se passe sur mobile, on lit ses mails, on lit les news rapides sur Twitter, on communique sur ses événements à travers Facebook, on fait son CV sur Linkedin… Continuer à faire du print pour essayer de concurrencer ces nouvelles technos est une bêtise. Par contre, lire des articles de fonds sur un écran, est fatigant, donc on préconisera de lire ça tranquillement sur du papier à tête reposée… La déconnexion étant également un des thèmes récurrents en ce moment, le fait d’aller se caler sous un arbre sans artifices numériques accompagné d’un livre imprimé avec une couverture en tissu et du joli papier est super agréable. Le revival du lettering et de l’impression à l’ancienne avec des embossages splendides, des packagings élégants sont également de bonnes preuves que le papier est loin d’être mort.

Comment envisagez-vous votre métier dans les années à venir ? Quelles sont les principales évolutions auxquelles vous aurez à faire face ?
Pour moi, le mélange entre tangible et numérique est au cœur des révolutions à venir, j’ai d’ailleurs créé un projet (en partenariat avec Exaprint) qui s’est appuyé sur ce concept. Le but était de créer une passerelle entre le livre et son site Web. Ainsi, le lecteur pouvait profiter du confort de lecture qu’apporte le papier et, à l’aide de commandes vocales imprimées, il accédait directement sur son écran à la suite des articles alimentés par du contenu enrichi type vidéos, liens, images

C’est ça le futur pour moi ! La progression fulgurante de la réalité augmentée (RA) va redonner une seconde vie au print ! Apporter du digital dans le monde tangible est une vraie mine d’or aussi bien dans le jeu de société que dans l’information par exemple… Il y a tout à créer et à imaginer dans ce nouveau monde ! La technologie grand public n’est pas encore réellement bien au point, même si l’exemple des succès de Pokemon Go ou de Snapchat sont super-encourageants !

Mais de toute manière, avant la RA, il y a la réalité virtuelle (VR) qui est en train de tout révolutionner, les chiffres sont justes énormes et la vitesse de déploiement s’accélère… beaucoup plus vite que le mobile par exemple. Donc ça, c’est mon prochain Eldorado, car il y a tout à créer ! La sensation de se plonger dans une expérience VR est tellement puissante qu’elle est presque hypnotique… Et si, comme beaucoup, vous avez été déçu par des expériences VR testées auparavant, c’est normal, là aussi les technos n’étaient pas prêtes. Je vous conseille de retester dans de bonnes conditions des expériences en 2017, vous prendrez une grosse claque ! En tant que designer, c’est un outil incroyable pour raconter des histoires !

Quelles sont les qualités qui vous ont fait réussir dans le métier ?
La passion, le fait de ne jamais rien lâcher, la soif d’apprendre en permanence, la veille quotidienne liée aux métiers, le fait de s’intéresser à tout et surtout le fait de toujours faire en sorte de s’amuser ! Le jour où je ne m’amuserai plus dans tout ça, je ferai autre chose…

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